jeudi 22 février 2007

Comme mon ombre

Elle doit me poursuivre et me coller depuis aussi longtemps que la cigarette je crois.
Elle n'est pas odorante ni visible mais toute aussi nocive.
La culpabilité.
J'ai pourtant acquis avec les années une certaine confiance en moi, je ne doute plus de la même façon, ou du moins plus sur les mêmes sujets. Mais certains restent.
C'est le constat effarant que j'ai encore fait le week end passé.
Repas familal chez nous, ici à la maison.
Convives: mes parents et mon frère. Si vous avez suivi un peu ce blog, vous savez quelles relations ambigues et douloureuses je peux entretenir avec l'entiéreté de mes invités ce jour là.
Néanmoins, j'essaye de préserver les apparences et je sais que mes parents ont énormément besoin de ces moments s'apparentant à la normalité pour tenir.
Fin du repas, alors que je m'active au salon pour ranger un peu ce que les enfants avaient fait comme bazar, et aussi comme d'habitude et en toute discrétion, m'échapper de l'ambiance pesante que j'ai du mal à supporter, mon frère me rejoint.
Avec, comme toujours, la même phrase. "j'aurais besoin d'un coup de main"
Comme ce n'est ni la première fois, ni la dernière, ni le moment, ni même le bon mois, je lui dis "non"
Et alors que j'aurais pu me contenter de lui dire simplement non, je ne peux pas ou que je ne veux pas, je me mêle d'argumenter. Pourquoi me direz vous? j'ai pas à me justifier.
Bah si j'en ai besoin et je crois que le mois ne m'a pas encore apporté mon soul de conflits car non seulement j'argumente mais en plus j'étale largement le pourquoi du "non"
Evidemment, le sujet de mes parents revient sur le tapis. Le fait qu'il les saigne à blanc tous les mois, eux qui ont à peine de quoi subsister. Le fait qu'indirectement c'est moi et ma famille qu'il saigne aussi financièrement, puisque tous les mois une partie de mon salaire est versée sur le compte de mes parents pour les aider.
Le fait qu'il a une vie faite d'emmerdes grosses comme des maisons, dans lesquelles meme avec la meilleure volonté du monde, vous ne sauriez vous fourrer.
Qu'il a l'art de les bouffer à petits feux et qu'il les fera crever.
Bref j'y vais à fond, ça me sort sans meme que j'ai à bouger des lèvres. Tout ce que mon coeur renferme depuis des années, sort comme dans un torrent de paroles que je ne peux arrêter.
Et lui royal, très calme me dit qu'il n'en peut rien, qu'il est malade, que la vie est dure pour lui aussi, que mes parents ont le devoir de l'aider puisqu'il n'est mentalement pas apte à se gérer seul.
Qu'il comprend que je sois revoltée, mais que c'est parce que je me sens coupable de ne pas réussir à les sortir de là, que je réagis comme ça. Et il a pas tort, mais ça me révolte d'autant plus que c'est comme ne pas entendre ce que je lui reproche mais bien retourner ça contre moi.
Je m'énerve devant sa suffisance, je me jure de ne pas me laisser avoir, je sais qu'il est malade mais je suis convaincue qu'il est beaucoup trop facile de se réfugier derrière tout ça pour disculper tous ses mauvais choix.
La conversation dure et dure. Ma mère vient aux nouvelles, bientot suivie de mon père.
Et là, elle me tombe dessus. La culpabilité.
Je vois dans les yeux de ma mère tellement de peine, tellement de chagrin que je craque.
Et je pleure tout en lui disant que c'est pas normal ce qu'il leur fait subir, que je sais que c'est dur pour lui mais qu'il doit mettre de l'ordre dans sa vie sinon il va me les faire crever.
Et ma mère, ma pauvre mère, hoche la tête et murmure: "mais ça va aller tu verras"
Et je culpabilise encore et encore.
De ne pas pouvoir les assumer entièrement, ne pas pouvoir les envoyer en vacances et les abriter de tout soucis. Je culpabilise même d'être désagréable avec lui et de par là meme, lui infliger du chagrin.
Et j'ai mon autre moi, celui qui est fort et désinvolte qui dit:" mais enfin après tout ce qu'il a fait, tu continues à te laisser amadouer"! et mon moi, le vrai et le seul dit: "bah oui, mais que faire, je me sens si coupable"
Et Dieu que je déteste ce moi là.

8 commentaires:

Anonyme a dit…

Je ne te suis pas depuis très longtemps, donc je ne sais pas de quoi souffre ton frère (désolée, pas le temps d'aller tout lire). Mais culpabilité pour culpabilité, pourquoi ne pas le mettre dans un centre de soins ? Là au moins, il ne pourra plus nuire à tes parents.

Courage, les liens du sang n'autorisent pas tout.

Cris a dit…

Bonsoir Fabilou

les centres de soins il y a passé une bonne partie de sa vie, tant qu'il est sous médicaments, il tient une vie plus ou moins normale mais sans grande conscience de la réalité et avec des comportements sociaux très étranges
je t'invite, si tu le souhaites, à lire:
le post dont le titre est "2" daté du mercredi 15 novembre 2006
Je te souhaite une belle soirée

Lady_Marian a dit…

« "j'aurais besoin d'un coup de main" » -CesCris

J'ai lu que des bouts de votre histoire....Donc il est possible que la solution (ou la piste de solution) que j'avance soit totalement dans le champs de pétakes ;-)

Que pensez-vous de l'idée de LUI demander un coup de main ?

J'sais pas là, mais tant qu'à lui donner de l'$$ ou encore en donner à vos parents à chaque mois, pourquoi ne pas lui demander de vous aider à quelque chose ?

( il ne travaille pas, right ?)

Parce que malade ou pas, il doit le savoir qu'il est un poid pour vos parents...non ?

Vos parents sont vieillissants, ne pourrait-il pas (encore si il est sur l'aide social, genre) devenir un aidant naturel et onbtenir un peu plus d'$$.

Pour en revenir à la première idée, j'sais pas, mais lui faire faire des travaux en échange de ses quelques $$ que vous lui donneriez de toute façon ?

Si il est bon avec ses mains, l'aider à faire des circulaires pour mini-travaux pour personnes agés ( épicerie, réparer lavabo qui fuit, accompagner chez l'doc ).

Il a sûrement des qualités, les pommes ne tombent pas toujours loin de l'arbre.

Essayez peut-être de le regardez d'une façon différente.....oubliez quelques instants le passé et tentez de voir se qui est bon en lui.

Mais encore, vous avez peut-être déjà essayer tout ça.....

Mon ti 2 cennes en vrac !

;-))

Lady !

Cris a dit…

bonsoir Lady

effectivement c'est une possibilité à envisager mais les rapports sont tellement tendus en ce moment que je pense ne pas la mettre en pratique tout de suite
cette relation de culpabilité faudra pourtant bien un jour que je la gère d'une façon ou d'une autre
merci pour vos encouragements
(ps: j'espère que votre petiot va mieux)

tirui a dit…

une quinzaine éprouvante entre les histoires de famille et de belle-famille, en effet.
Peut-être que tu prends toutes ces histoires trop à coeur ou te sens-tu trop concernée par les destins et les vies de tous les membres de ta famille, alors même qu'ils sont tous majeurs ? laisse-les se débrouiller un peu et soigne tes sentiments de culpabilité à coup d'un peu d'indifférence ? (un truc que je fais très bien mais c'est peut-être plus facile à faire pour un homme)

Anonyme a dit…

Je suis allée lire et je ne sais que te dire. Je sais seulement que c'est une maladie terrible. Tu as du courage !

J'aime bien l'idée de Lady mais est-elle applicable ? Je pense que seul un médecin pourrait le dire.

Marchello a dit…

Ma mère disait "Ça sert à rien de se morfondre". Ça veut dire arriver à accepter ce qu'on ne peut changer. Faire avec. Courage.

Cris a dit…

Turui: ce n'est pas peut etre que je prends trop à coeur la vie des autres, c'est surement, et je le sais, mais je parviens rarement et difficilement à faire autrement.
L'indifférence est pour moi l'arme la plus redoutable, enfant je me souviens que pour me punir de qqch mon père m'ignorait superbement, et je préferais encore recevoir une bonne fessée.
Je ne sais si c'est plus facile à faire pour un homme mais pour moi c'est rellement compliqué :o)

Fabilou, merci d'avori pris la peine de lire. Merci.

Marchello: effectivement, on devrait apprendre à se résigner et à ne pas attendre de miracles, mais faut croire que j'ai, bien malgré moi, une indéfectible foi, dans mes pouvoirs pour changer les autres ou les choses :o)